Suite à la crise financière, les Etats-Unis ont entrepris une réforme générale de leur législation financière. La loi a été proposée au Congrès en décembre 2009 et porte le nom des deux personnes chargées de la défendre, Barney Frank pour la Chambre des Représentants et Chriss Dodd pour le Sénat. Celle-ci a été signée par le président Barack Obama le 21 juillet 2010.
Suite à d’importants débats, les mesures les plus radicales ont été largement atténuées, notamment la Volcker Rule. Cette loi avait initialement pour but d’interdire aux banques de dépôt d’investir pour leur propre compte, d’entrer en relation avec les hedge funds et les private equity funds. Certain l’ont même comparée au Glass-Steagall Act (NEW YORK TIMES, « Volcker Fails to Sells a Bank Strategy », 20 Octobre 2009), c’est dire si elle était audacieuse ! Elle a été reprise dans le texte final en requérant des banques ayant de telles pratiques une capitalisation supérieure (sec. 619).
Voici, en résumé, les points principaux de la réforme et des modifications du cadre réglementaire américain :
- Il ne doit plus être possible que le contribuable soit forcé de sauver des établissements financiers parce qu’ils menacent le système économique (Too big to fail). Dans le pire des cas, sa contribution doit rester limitée. La création d’un organe chargé de surveiller les risques systémiques aidera à atteindre ce but (sec. 101 ss.). Il s’agira du Financial Stability Oversight Councel (sec. 111). Cet organe sera notamment composé du Secrétaire au Trésor (actuellement Timothy Geithner), du Président de la FED (actuellement Ben Bernanke) et des autorités de surveillance des marchés. En plus, une autorité sera chargée de régler la liquidation des banques importantes sans porter atteinte à l’économie en général (sec. 201 ss.).
- La protection du consommateur sera également améliorée (sec. 901 ss) tout comme les droits des actionnaires. Notons que ceux-ci seront limités puisque le vote des actionnaires sur les compensations et les parachutes dorés des membres de la direction ne sera pas contraignant (sec. 951).
- La réforme comporte également un point particulièrement intéressant pour nous puisqu’elle vise à rendre transparents et responsables les systèmes de négociation OTC (sec. 701 ss).
Celle loi a été âprement critiquée et est considérée comme insuffisante par certains experts américains. Elle ne réinstaure pas la séparation du Glass-Steagall Act, qui permettait de mettre à l’abri de toute spéculation les dépôts des clients ordinaires. La création de deux nouvelles autorités de surveillance n’est également pas forcément positive, puisqu’elle disperse encore les forces à disposition, avec tous les risques de doublons et de conflits que cela comporte. Elle ne scelle pas non plus précisément le sort de Fannie Mae et Freddie Mac, deux acteurs majeurs de la crise économique. Finalement, les points réglés par la réforme ne le sont que partiellement, comme nous le verrons pour les marchés OTC (http://docs.docstoc.com/orig/683130/6fcb2e89-6895-425d-bb8b-%200a5c4d0d3bcb.pdf
0a5c4d0d3bcb.pdf). Laurence J. Koltikoff, professeur d’économie à l’Université de Boston, a même affirmé que « this law is like being invited to dinner and served pictures of food ». Le lobbysme important des banques, UBS et le Credit Suisse en tête61, a donc fonctionné.
La SEC a déjà élaboré un avant-projet précis : la « Regulation of Non-Public Trading Interest » visant justement ces dark pools. Il y aura trois changements principaux à la réglementation actuelle :
- La définition des termes « offre » et « demande » sera modifiée afin d’être applicable aux IOIs (bid and offer, rule 600 (b)(8), NMS Security Designation and Definitions). Toutefois, les transactions supérieures à 200'000 USD ne seront pas couvertes par cette modification.
- Le seuil à partir duquel un ATS doit publier le carnet d’ordre d’un titre négocié sur sa plateforme sera modifié. Actuellement, il est fixé à 5% du volume moyen d’un titre durant au moins quatre mois sur les six derniers mois (Rule 301 (b)(3)(i), Requirements for ATS). Ce seuil sera abaissé à 0,25%.
- Finalement, la transparence post-trade devra aussi être augmentée. Les ATS seront forcés de publier leur identité lors de l’exécution d’une transaction.
La réglementation américaine décrite ci-dessus vise donc à couvrir la majorité des transactions OTC. Il subsistera toutefois une zone d’ombre, accessible uniquement lorsque des montants élevés sont traités.
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- ATS = Alternative trading system
- FED = Réserve fédérale américaine
- OTC = Over the counter
Le texte complet est consultable ici (en anglais): http://banking.senate.gov/public/_files/Rept111517DoddFrankWallStreetReformandConsumerProtectionAct.pdf