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16 nov. 2011

La Liberté: La locomotive des pendulaires fâchés

Article paru dans La Liberté, 16 novembre 2011
Tamara Bongard, Stéphane Sanchez


Dans la même édition que:


TRAINS • Le concept Romandie 2013 des CFF péjore la desserte de Romont et Palézieux. Eric Davet a déposé hier une pétition avec 1500 signatures, pour qu’ils revoient leur copie. Il s’explique le temps d’un trajet jusqu’à Genève. 

6h15. Eric Davet a encore le temps de prendre rapidement un café. D’ici quelques minutes, il se glissera dans sa voiture, partira de son domicile de Villarimboud pour rejoindre la gare de Romont. A cette heure, il devrait rester de la place dans le Park and Ride. Mais rien n’est garanti, même s’il débourse 60 francs chaque mois pour ce service. 

L’informaticien n’a toutefois pas le loisir de chercher pendant des heures un autre lieu pour laisser son véhicule. Il doit prendre le train de 6h44 pour se rendre à son travail à Genève (heureusement, le jour du reportage, il n’y avait pas de panne comme celle qui a paralysé hier le trafic entre Genève et Lausanne, voir page 16). Les horaires 2013 des CFF, tels qu’annoncés, vont rallonger de 16 minutes chacun de ses trajets (voir ci-dessous et notamment notre édition du 14 octobre). Le pendulaire se bat pour changer la donne. Fer de lance des ces délaissés des transports publics, il a remis hier une pétition réunissant 1500 signatures au Conseil d’Etat fribourgeois, demandant le maintien des arrêts InterRegio en direction de Genève-Aéroport au départ de Romont et Palézieux. Vendredi, il répète l’exercice à Berne auprès du Département fédéral des transports. 

Environ 900 fr. de frais 
6h20 est passé. Le pendulaire se glisse dans sa voiture. Il a choisi la Glâne après plusieurs déménagements. «J’habitais Fribourg. Mais en venant vivre à Villarimboud, je gagnais 20 minutes par trajet pour rejoindre mon travail, sans changement de train, avec davantage de confort», raconte-t-il en conduisant dans la nuit. «Et ces 20 minutes, je vais les reperdre.» Le quinquagénaire, qui travaille dans un milieu très spécifique, ne trouverait pas de poste dans le canton. Pas question non plus de déménager, alors qu’il a acheté récemment une ferme, qui doit encore être partiellement rénovée. Au Park and Ride, il trouve effectivement une place. Ce qui est a fortiori le cas quand il prend le train de 5h44. Les choses se compliquent aux alentours de 7h30. «Des parcs pour les pendulaires seront supprimés dans la région. Les gens viendront se garer à Romont», annonce déjà Eric Davet en se dirigeant vers le quai, où plusieurs voyageurs attendent. Le train arrive, l’homme y entre. A ce moment-là, en principe, il allume son ordinateur portable et commence à travailler. 

De porte à porte, le Glânois met 1h30 pour relier son domicile à son travail. Si le trajet se rallonge, il pense à une autre solution. Par exemple rejoindre en voiture Coppet, village vaudois en bordure de frontière genevoise, pour y prendre le train. «Je fais partie des privilégiés qui ont un véhicule, tout le monde n’a pas cette possibilité», commente Eric Davet. Actuellement, ses frais de trajet dépassent les 900 francs par mois:300 francs pour l’auto, 305 fr. pour l’abonnement des CFF, 60 fr. pour sa place de parc à Romont et 250 francs pour une chambre à Plainpalais quand il ne peut prendre son dernier train. Des dépenses qu’il peut assumer grâce à son poste de cadre supérieur. 

«Je suis contre le clivage romand-alémanique, mais les gros projets des CFF, comme le Gothard, ont eu lieu outre-Sarine. Alors que le prix de l’abonnement est le même dans toute la Suisse», souligne Eric Davet, pendant que le train s’arrête en gare de Lausanne. Dans le chef-lieu vaudois, le transbordement des passagers est très important. Les chiffres avancés par les CFF sur le nombre de voyageurs, il les remet en cause, les estimant trop faibles. Selon ses pointages à lui, ils sont 180 à 200 à penduler chaque jour entre Romont et Genève. Des gens de tous les âges et de tous les milieux sociaux. Et venant d’un large rayon géographique. 

Aujourd’hui, le Glânois consacre chaque jour entre trois et quatre heures à son combat pour plus de cohérence dans ces futurs horaires. Ce qui le motive?«Je n’ai pas un caractère à obéir à un «circulez, il n’y a rien à voir», répond l’homme apolitique. Propulsé sous les projecteurs, un peu par hasard, il souhaite contacter les autres pendulaires fâchés de Morges, de Nyon, et le Veveysan Savio Michellod, pour inciter les CFF à reprendre globalement le concept Romandie 2013, qui favorise l’Arc lémanique. «Nous pourrions aussi créer une association d’usagers. Mais je ne pourrais pas en prendre la tête, pour des raisons de temps», avertit Eric Davet, alors que retentit l’annonce d’arrivée du train en gare de Genève. A cet homme, il ne faut pas promettre des études et des «tout ira mieux dans dix ans»: «Les gens ont besoin de solutions tout de suite.»I
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